240620 - MUS QZD - DESTOUCHES - TÉLÉMAQUE ET CALYPSO - SOLISTES, LES OMBRES, M. BLANCHARD & S. SARTRE

 

	240620 - MUS QZD - DESTOUCHES - TÉLÉMAQUE ET CALYPSO - SOLISTES, LES OMBRES, M. BLANCHARD & S. SARTRE
		ANDRÉ-CARDINAL DESTOUCHES 1672-1749 « Télémaque & Calypso » Isabelle Druet (Calypso), Antonin Rondepierre (Télémaque), Emmanuelle De Negri (Eucharis), David Witczak (Adraste), Hasnaa Bennani (l'Amour, Cléone, Prêtrese), Adrien Fournaison (Apollon, Idas), David Trticou (Arcas, un Plaisir), Colin Isoir (Grand-Prêtre), Les Chantres du Centre de musique barouqe de Versailles, Les Ombres, Margaux Blanchard et Sylvain Sartre. CVS (2CD) DESTOUCHES – Télémaque et Calypso.
	TECHNIQUE : 4/5 Enregistré en octobre 2023 au Conservatoire de Puteaux, par Frédéric Briant. Une image équilibrée, harmonieuse, dans laquelle les sonorités de l'orchestre se déploient avec richesse et générosité. Pupitres bien définis et voix de solistes sur le devant de la scène.
	« Du sentiment, des entrailles, et du goût » : éloge du compositeur Destouches pour saluer en 1714 la création de ce Télémaque et Calypso inspiré par la vogue du roman de Fénelon. Si l'épisode de l'île de Calypso a fourni à l'opéra européen un scénario propice, des années 1700 à l'ère romantique, le librettiste Pellegrin livrait une adaptation astucieuse, puissante, combinant épopée et tragédie au profit d'un grand spectacle musical où rôdent les ombre du duo Quinault-Lully (Armide) ou de Racine (Bajazet). En vérité, voici un opéra majeur des décennies foisonnantes d'avant Rameau, avec trois protagonistes qui, pour la reprise de 1730, échurent aux futurs créateurs de Phèdre, Hippolythe et Aricie. Consécutif au dernier festival d'Ambronay, l'enregistrement suit cette révision de 1730 que couronne une nouvelle tempête, mais plusieurs séquences chorales souffrent de coupures plus importantes qu'au concert : pourquoi ? La fête enchantée de l'acte III, recelant une admirable chaconne, est intacte mais des amputations lors des cérémonies au temple altèrent économie et proportions – dommage vraiment pour celles du IV. L'orchestre de Margaux Blanchard et Sylvain Sartre respire du moins sensibilité et noblesse, attaché à tendre le drame sans heurter le geste. Les seize jeunes voix du chœur versaillais ne ménagent pas leur zèle. En dépit de détails perfectibles, on goûte ici l'imagination féconde de Destouches. La distribution n'est pas en reste, avec d'excellents comparses, Adrien Fournaison notamment, mais surtout Hasnaa Bennani (luxe et volupté) et Marine Lafdal-Franc (d'un relief mémorable). David Witczak soutient les apparences saillantes du malheureux Adraste, quand le ténor d'Antonin Rondepierre (timbre séduisant, chant trop peu varié) donne à entendre un Télémaque juvénile et gourmé : caractère tout à fait plausible où dominent les héroïnes. Emmanuelle De Negri ravit une fois de plus, offrant à la dignité sacrificielle d'Eucharis une qualité d'incarnation, de style, qui paraît sans rivale. La cyclothymie redoutable de Calypso trouve en Isabelle Druet une voix moins phonogénique mais une interprète inspirée, éloquente, mobile, retorse : coup de maître encore, qui révèle une forte figure dans un opéra à connaître absolument. Jean-Philippe Grosperrin